Aujourd'hui était ton jour de repos car on te remplaçait, toi qui pensais que tu allais passer une merveilleuse journée c'est ton bras qui te faisait souffrir. Tout ce que tu avais appris ici et à l'hôpital en Pologne n'y changeais rien et cette courbature restait un problème pour toi. Tu avais lu et relu les quelques livres entassées dans ta chambre sans trouver une solution.
Quelle honte pour quelqu'un qui a étudié la médecine
Cette pensée t'obsédais comme si le fait de ne pas obtenir de résultat positif à la résolution de tes maux était une énième défaite dans ton parcours. Tu décidas de faire avec et d'essayer d'oublier la douleur en allant te balader près de la serre de l'orphelinat ton appareil photo en main.
C'est avec nostalgie que tu retrouves ce lieu que tu chérissais étant adolescent, avec le grenier c'était la deuxième destination où tu te rendais quand tu étais déprimé. Cela faisait deux ans que tu avais rejoint de nous ce lieu qui te hantait mais la serre t'apaisais sans vraiment savoir pourquoi. Le pouvoir des fleurs peut-être.
Ta crampe te fais grimacer lorsque tu prends en main ton appareil pour prendre quelques clichés. Putain. Tu secoues légèrement ton bras ce qui te fait encore plus ressentir la douleur. Mais t'es con bordel. Tu soupires et tu te dis que le mieux serait de rentrer te reposer. C'est en balayant la serre du regard que tu aperçois quelqu'un.
Tu la reconnais très vite, c'est la bibliothécaire de l'orphelinat qui n'est pas là depuis longtemps. La dernière où tu l'as vu c'était lorsqu'elle avait amené Sun et Thorn pour les soigner après une bagarre. Tu trouvais qu'elle était jolie et ce, depuis le début que tu l'avais entraperçue entre deux étages de bibliothèque. Tu étais trop timide pour aller lui parler mais aujourd'hui ça ne pouvait pas être pire alors tu n'allais pas te ridiculiser devant elle, non ?
En vérité tu veux juste l'inviter à sortir quelque part le week-end ou boire un verre pour faire connaissance entre collègues... Même au sein de l'orphelinat tu t'en fichais. Où est le mal ? Bon fait pas le con. Tu t'avances vers elle et essayes d'attirer son attention en même temps.
« Bonjour, j'espère que je te dérange pas dans un truc important mais j'aimerai te deman- »
Juste avant de finir ta phrase tu sens ton corps se pencher vers l'avant, un foutu tuyau d'arrosage que tu n'avais malheureusement pas vu avait eu raison de ton équilibre. Tu te retrouves donc à ses pieds la tête à même le sol. Ton bras souffrant qui avait légèrement pris le choc quant à lui eut raison de ton expression faciale peu flatteuse que tu espères qu'elle n'est pas remarqué.
En voilà donc, une bien jolie fleur. Ses pétales d’or encore légèrement refermés sur eux-mêmes, dans l’attente du soleil pour enfin éclore. Petit bourgeon deviendrait un jour la plus merveilleuse des plantes qui soit, mais pour l’heure, il fallait encore attendre. Qu’elle rencontre des gens, que son existence parfois tumultueuse s’apaise et que doucement, elle puisse s’ouvrir au monde. Kind souri doucement alors que du bout des doigts elle effleurait tendrement quelques boutons dorés. Des fleurs discrètes, qui bientôt s’éteindrait. La serre dans laquelle elles se trouvaient ne pourrait pas les garder éternellement et il faudrait attendre la fin du printemps prochain pour voir quelques jeunes pousses apparaitre à nouveau. Une étrange passion, bien peu en adéquation avec son tempérament de feu. La jeune femme aimait les fleurs et adoraient passer quelques moments loin des élèves et du personnel enseignant, à l’abris des regards, ayant alors pour seule compagnie les végétaux. Si elle était d’ordinaire de genre rentre-dedans, toujours à vouloir avoir le dernier mot et raison sur tout, quitte à passer pour une rustre franchement hautaine, Kind prenait pourtant un certain plaisir à déambuler dans la serre avec un certain apaisement. Sur son visage, un sourire serein. Elle n’était pas tendue, pas même stressée. En fait il aurait même été tout à fait juste de dire à cet instant-là qu’elle n’était plus Kind. Adieu son manteau d’apparence qu’elle revêtait à chaque fois qu’elle mettait un pied à Prisme ; lorsqu’elle était seule de la sorte, elle était Kamille, la douce enfant un peu sauvage aux milles et un rêve qu’elle ne réaliserait sans doute jamais. Un brin nostalgique lorsque ses doigts effleuraient les pensées et les narcisses, elle semblait presque plus belle qu’elle ne l’était réellement. Depuis petite elle prêtait aux fleurs certaines vertus, dont celle de la sagesse, la patience et la bienveillance, des vertus qu’elle rêvait bien secrètement de posséder sous ses élans d’impulsivité.
« Bonjour, j'espère que je ne te dérange pas dans un truc important mais j'aimerai te deman- » Une voix qui la fait sursauter. Kind se retourne, surprise, et son visage se fige. Elle qui paraissait si douce et si naturelle la seconde d’avant se revêt de son masque de bibliothécaire pour observer le jeune homme au sol. L’instant d’après, elle s’approche pour l’aider à se relever. « Est-ce que ça va ? » Question bête, mais elle avait parlé sans réfléchir. Devant elle, Owl, l’infirmier. Elle l’avait rapidement croisé quelques jours plus tôt et elle avait également entendu quelques professeurs parler de lui. Un ancien de Prisme apparemment, que certaines enseignantes trouvaient assez mignon. Elle, elle n’y avait jamais prêté attention plus que cela a vrai dire ; il semblait charmant, mais il était comme les autres et Kind avait la sale habitude de ne pas s’approcher des autres. Cependant, il avait visiblement fait l’effort de venir lui parler et très franchement, même si elle n’avait pas écouté, elle était assez gentille pour s’enquérir du fameux sujet de conversation. « Je suis désolée, j’ai eu peur pour vous et j’étais surprise, du coup, je n’ai pas écouté ce que vous disiez… » Elle affiche une mine navrée, presque désolée. Il lui semblait vaguement qu’il l’avait tutoyé, mais maintenant, elle n’était plus certaine de rien. Finalement elle se redressa, être accroupie à côté de lui n’avait rien de très courtois après tout…