Ses pas résonnants à un rythme effréné dans les longs couloirs de l'orphelinat. Wave venait de sortir de la bibliothèque après deux longues heures de travail. En ce moment, elle n'arrêtait pas. Entre ses cours, ses devoirs et ses projets personnels, la fatigue s'était accumulée. Elle avait eu si peu de temps libre qu'elle n'avait pas eu le temps de faire quoi que ce soit pour se détendre mais aujourd'hui, enfin, elle pouvait faire ce qu'elle voulait ! Prendre le temps de souffler et de penser à autre chose. Et ce qu'elle désirait le plus pour le moment, c'était d'aller se baigner. De plonger son corps fatigué dans l'eau fraîche et de se couper de ce monde si stressant. C'est pour cette raison qu'elle marchait si vite, le nez plongé dans son sac pour vérifier la présence de l'un de ses nombreux maillots de bain.

Et comme toute action a des conséquences et que la pauvre Wave est une sacrée poisseuse, l'incident arriva. En effet, alors qu'elle ne regardait pas où elle mettait les pieds, elle avait lentement dévié de sa trajectoire et trébucha sur une feuille, simplement laissée à l'abandon. La jolie blonde avait soudain sentit son corps chuté vers l'avant. Dans un réflexe de survie, ses mains avaient agrippé la première chose à sa portée et c'est là que le drame arriva. En effet, c'est le buste du fondateur de l'école qui se trouva sur sa route et qui, au lieu d'empêcher la chute, l'accompagna dans celle-ci. Un bruit sourd avait retentit mais il fallut quelques secondes tout de même à la jeune orpheline pour comprendre la situation. La douleur de la chute passée, son regard s'était posé sur le buste, maintenant au sol. Le visage du fondateur était largement fissuré et l'oreille s'était brisée sous le choc. La panique l'avait gagné bien rapidement. Sans perdre une seconde, elle s'était de nouveau jetée au sol, à la recherche de l'oreille détachée du buste. Celle-ci avait sans doute été projetée au loin, sortant de son champs de vision. Un juron lui échappa bien vite.

- Et merde ! Faut que je me dépêche ... !

Oui, elle allait cacher les preuves. Comment ? Elle ne savait pas encore pour ce point mais déjà, il lui fallait récupérer l'éclat de buste. Elle n'imaginait pas la réaction de la directrice si elle se faisait chopper ... Rien que d'y penser, un frisson de terreur secouait sa chaire ... Oui, il lui fallait éviter ça à tout prix ! Elle continuait donc ses recherches, sa chevelure blonde et asymétrique se mouvant en harmonie avec ses gestes, un peu à la manière de vague. En tout cas, il était clair que Wave était loin d'être une délinquante de nature. Bon sang, qu'est-ce qu'elle aimerait être à la piscine en ce moment, au lieu de dissimuler les preuves comme si elle était une criminelle. Mais le destin est capricieux visiblement ... !

La jeune femme avait l'impression d'entendre son coeur battre dans ses tympans comme la plus stressante des fanfares. Le rythme était rapide et son esprit en ébullition, analysant les diverses possibilités qui s'offraient à elle. Enfin, ça, ce fut jusqu'à ce que soit détourné de ses pensées par un bruit sourd, bien rapidement suivit d'une voix féminine emplie d'une certaine colère. Tournant la tête pour découvrir l'origine de ce son, la blonde découvrit un des professeurs de l'établissement. Tsubaki. La prof de botanique. Si Wave ne faisait pas partie de ses élèves, elle l'avait déjà aperçu à diverses occasions, toujours de loin. Une femme attentionnée et très intelligente. Mais, était-elle assez gentille pour laisser la demoiselle s'enfuir malgré le fait qu'elle venait de briser le buste de la personne la plus important de toute l'histoire de cet orphelinat ? C'est ce qu'elle allait voir ... La voix légèrement tremblotante à cause de sa nervosité, elle répondit donc à la question qui avait été posée et qui restait alors en suspens.

- O-Oui ! Je suis désolée, j'ai trébuché, je suis tombée et quand j'ai voulu me rattraper, j'ai ...

Son regard s'était alors posé sur la pauvre statue fissurée et enfin, elle remarqua la fameuse oreille de pierre, projetée un peu plus loin. Sa main l'attrapa sans la moindre hésitation et elle la brandit un peu vers le ciel à la manière d'un célèbre héro de jeu-vidéo à la tunique verte. Enfin ! Enfin, elle l'avait retrouvé ! C'était déjà ça au moins ... ! Elle put donc se redresser, époussetant son pantalon d'un geste rapide avant d'essayer de porter le buste de pierre taillée. En un mot ? ECHEC. L'objet décoratif était particulièrement lourd et si elle avait réussi à le redresser, le soulever était une toute autre histoire. Il ne lui restait qu'une possibilité : Demander de l'aide à la femme à la chevelure ébène et aux mèches violettes. Elle la fixa, quelques longues secondes, visiblement mal à l'aise avant de demander avec timidité.

- Vous allez me dénoncer .... ?

Bon sang, si seulement elle avait regardé où elle mettait ses pieds ... Elle serait déjà entrain de nager, paisiblement, coupée de tout. Et à la place ? Elle est coincée en tête à tête avec une enseignante, visiblement déjà fatiguée et de mauvaise humeur. Le destin était cruel avec elle aujourd'hui ...

Une sainte ? Un ange ? Qui sait mais ce qui était certain pour la blonde, c'est que cette apparition était une véritable bénédiction pour elle. L'enseignante semblait assez conciliante pour la laisser s'en sortir. Elle était même prête à l'aider afin de cacher les preuves de son "crime", bien que ce terme soit quelque peu exagéré. Bien qu'elle était surprise, elle ne rejeta pas ce coup de main et répondit donc à sa question, un éclat d'espoir dans le regard.

- Wave Madame !

Ramassant les quelques éclats trainant ici et là avant de les fourrer dans ses poches, la jeune femme prit le temps d'analyser un peu la femme qui se trouvait à ses côtés. De longs cheveux noirs, se terminant par une teinte de violet, des cernes larges et visibles mais un sourire qui se voulait doux et rassurant.

- Merci pour vo- ... je veux dire ton aide ! La salle d'art semble être une bonne idée !

D'un pas rapide, elle se dirigea alors vers le buste pour prêter mains fortes à la botaniste, passant ses bras autour de la large tête de marbre faite. À deux, elles y arrivèrent. Le buste se souleva de son socle, son état subsistant à travers la poigne de deux femmes qui prirent alors la direction de la salle où ils trouveraient de quoi coller les éclats brisés à l'objet d'origine, avec plus ou moins de succès. Pendant cette marche, un silence s'était installé, jusqu'à ce que la demoiselle prenne de nouveau la parole, poussée par sa curiosité.

- Vous ne portez pas le fondateur dans votre cœur pour une raison particulière ? Le classement peut-être ?

Au moins, elle n'y allait pas par quatre chemins. La question était franche, dénuée de toute méchanceté. Une curiosité saine, presque enfantine, qui accompagnait la jeune fille dans tout les évènements de sa vie. Enfin, elles arrivèrent à destination. La salle d'art. Le passage compliqué de la porte passé, ensemble, les deux "criminelles" avaient déposé la victime de la blonde sur la table. L'odeur de la peinture lui prenait le nez et son regard était attiré par les moindres détails de la pièce. Elle n'était pas habituée à venir ici et était donc en pleine découverte.

- Tu sais où on va pouvoir trouver de la colle ? Je ne viens pas souvent ici ...