Cette chambre était une décharge qu'aucun agent n'aurait pris en charge ; une poubelle géante, une vide-ordure géant. Ça l'était peut-être, mais Thorn se complaisait dans ce bordel géant mais organisé. Il savait où était rangé tel ou tel ouvrage, comblait chaque centimètre de vide par un peu plus de choses, ramassées dehors ou des fringues. Ça le rassurait et alors, il se réfugiait sous la tente qu'il avait dressée au milieu de la pièce et sous laquelle il dormait, au lieu de le faire dans son lit. Il avait même fabriqué une petite lampe portative, avait augmenté la température du radiateur pour compenser avec le fait que la fenêtre était presque systématiquement ouverte.
Et pourtant, Thorn y était bien dans cette chambre cocon. Elle était presque la métaphore d'une tempête, et il se réfugiait dans le seul abri valable. Jusqu'à présent, on avait évité de lui dire quoique ce soit, alors il en avait été relativement. Les mains blessées par les débris de verre, il avait tout juste eu le temps de lire le message de Sun, cet idiot de Sun qu'il courut jusqu'à sa chambre.
Déjà, la porte était grande ouverte et deux surveillants y était en commentant gracieusement l'état de l'endroit. « Hey, mais c'est dégueulasse ça ! » Honnêtement, il n'aurait jamais pu trouver de drogue ou quoique ce soit dans ce bazar, aussi lui demandèrent-ils de tout ranger devant eux, une fois qu'ils le virent, l'oeil dépité, devant eux.
Le plus grand resta seulement à le surveiller alors que les mains de Thorn s'affairaient à rendre cet état potable, présentable. Une demie heure plus tard, il avait à peine fini, mais le surveillant déjà s'impatientait. Il fouilla lui-même la pièce, malgré le fait que Thorn gueulait son innocence « Non mais vous croyez vraiment tout ce que Sun vous dit, putain ! »
-Language. Rien que pour l'état de la chambre, t'es le bienvenu en colle vers 16 h. Emmène des cahiers, enfin tu connais, t'as l'habitude hein.
C'était dégueulasse. Et il le laissa planté là, avec les doigts qui lui faisaient mal, lui disant qu'il en aurait le double si ladite chambre n'était pas complètement rangée. Et que leurs guéguerres suffisaient comme ça, qu'on n'était pas dans un zoo. Thorn se sentit momentanément impuissant, il s'allongea en plein sur le matelas du lit désormais déchargé et ferma les yeux.
Trois secondes, trois petites secondes. Un vent frais vint lui ébouriffer les cheveux et lui donner le courage de se lever pour continuer à ranger.
Lorsqu'il arriva dans la salle où il était censé être collé, Thorn était claqué par ces heures de rangement, les cheveux mal coiffés, les bandages sur ses doigts avaient tendance à partir tous seuls et un énervement très net se lisait dans ses yeux (et dans tout son comportement, d'ailleurs, en venant, il avait bousculé un petit et l'avait invectivé pendant au moins une demi heure et accusé de l'avoir lui-même renversé.)
Quelques minutes plus tard, il entra dans la salle. Il avait l'impression de passer plus de temps en colles qu'à réellement bosser, c'était un comble. Au fond, c'était sans doute pour ça qu'il était si haut dans le classement...ou...pas, en pensant que Sun y pensait également la moitié de sa vie.
Thorn s'installa négligemment sur l'une des chaises et sortit ses affaires. Pour l'instant, il était seul, il espérait juste que ce ne serait pas à ce moment que l'autre serait puni. Si c'était le cas, les deux heures allaient devenir effroyablement longues. Il vérifia que son portable avait de la batterie et le rangea dans son sac.
Tout a commencé par une vengeance. De ton oreille meurtrie, tu as réponds à la vendetta en voulant lui briser les doigts, mais tu as été miséricordieux, sans doute plus que de raison. Mais il semble que Tohrn n’est pas sensible à ton magnanime. Les menaces sont montées d’un cran, et pour de la drogue que vous ne consommez pas, vous êtes destiné à vous revoir en heure de colle. Cela pourrait avoir une signification particulière, une rencontre en prison pour deux ennemis.
Mais pour toi, c’est un mardi.
Tu arrives dans la salle de colle comme si tu faisais tes courses pour de la crème solaire, donc avec un désintérêt profond et un agacement déjà certains. Tu remarques la tignasse de ton délateur et tu ne cèdes pas à une grimace de dégoût. Au lieu de cette bassesse, tu lui lances ton sac en pleine tête. Plus subtil. Tu te justifies d’un ton égal :
« My bad, je visais le siège à côté. »
C’est un pieux mensonge, tu sais trop bien viser pour une telle maladresse et ça se sait. Quitte à devoir supporter deux heures avec cette présence indésirable, autant que ce soit un peu marrant. Tu récupères ton bien nonchalamment et tu t’installes à côté. Vous êtes les seuls bagnards, tu aurais pu prendre n’importe quelle autre place pour être tranquille. Mais tu es un chieur Sun, et tu n’avais pas encore digéré ton agression.
Tu commences à sortir tes affaires qui se définissent par un crayon, une gomme et ton briquet. Tu n’allais quand même pas gâcher une feuille pour leur plaisir, tu auras comme ça un bon prétexte pour râler quand on te rappellera à l’ordre. Tout n’est qu’optimisation dans ce monde capitaliste.
Tu bailles ostentatoirement et tu te laisses tomber sur la table. Les bras tendus, tu te tournes vers l’ennemi. Tu hésites un instant, en vrai, il te fait presque pitié avec ses bandages. T’es peut-être allé un peu loin cette fois. Mais les douleurs à l’oreille ont été presque insupportables la nuit. Tu es incapable à dormir autrement que sur un flan uniquement, alors pour tes heures de sommeil perdu, il te devait bien quelques moments de galères.
Bon allez, tu vas faire un effort. Tu ouvres donc le dialogue, avec toute la gentillesse que tu peux avec quelqu’un que t’apprécies pas, donc pas grand-chose :
« C’est la drogue ou bien ? »
Tu es peut-être encore un peu trop salé pour être sympathique, mais tu fais de ton mieux, genre vraiment. Mais en vrai, tu ne sais même pas pourquoi tu tentes. Cela t’énerve rien que d’y penser. Tu n’as pas envie d’être là, encore moins avec lui, tu as l’impression que l’on t’étouffe. Tant d’énergie pour une discipline qui est voué à l’échec. Entre ce sauvage et ta personne, tu plains presque le surveillant qui devra éviter que vous vous étripiez. Tu le sens mal Sun, mais tu ne peux pas t’empêcher d’embraser toutes les mèches que tu vois.
Même si tu dois te prendre des ronces.
Hrp: désolée du retard, s'il y a un truc à changer n'hésite pas ;-;
HJ : c'était parfait ! :D n'hésite pas à te servir du pnj surveillant à tout moment dans ton rp ! :D
Se retrouver en colle n'était pas un but dans la vie pour Thorn.
Sans doute personne ne souffrait plus que lui de se retrouver assis sur un siège et ne pouvoir en bouger pendant de longues heures. Le comble serait...
Thorn était en train de penser au pire lorsqu'un sac lui arriva en plein visage. Il eut à peine le temps de se resaisir et de comprendre ce qu'il lui arrivait que Sun vint reprendre son bien et s'asseoir à ses côtés.
Le rouquin leva les yeux vers lui, presque au ralenti, le fusillant du regard et pensant très fortement un « non mais y'a toute la salle pour t'asseoir, ducon », en le fusillant du regard. Il ne se doutait pas qu'un adulte entrerait bientôt, aussi se tiendrait-il relativement tranquille, il n'avait aucune envie d'écoper d'une heure en plus à devoir faire une dissertation qui ne lui servirait à rien.
« La drogue ? Non mais tu es...y'avait pas de putain de drogue dans ma chambre ! Tu te doutes bien que je suis ici parce que c'était le bordel !!! mais j'étais bien, moi ! », grogna-t-il, le plus bas possible parce qu'il n'avait aucune envie que quelqu'un les entende régler leurs comptes, surtout si le but était qu'ils s'entraident pour un devoir. C'était pas comme si les surveillants les connaissaient pas, et tout le monde ici savait depuis l'affaire de l'oreille que les deux garçons n'étaient pas amis.
Finalement, alors qu'il était presque sur le point de casser de nouveau la gueule de Sun (à moins qu'il ne soit tenté de lui piquer son briquet pour lui cramer la figure), la porte s'ouvrit de nouveau et laissa passer un surveillant qui déposa un épais dossier sur leurs bureaux.
- Synthèse collective de géographie. Les notes compteront, vous avez intérêt à collaborer.
L'homme leur jeta un regard, à l'un puis à l'autre, et enfin alla s'asseoir à sa place à la place du prof, les surveillant d'un œil averti. Thorn se doutait qu'il ne les louperait pas s'ils commençaient à se friter, et qu'il ne leur ferait le plaisir de les laisser seuls dans la pièce non plus.
Tournant la tête vers Sun, tentant de calculer le temps qu'il leur faudrait pour décrypter ces épais dossiers, il grogna.
« Haha. C'est con, j'ai mal aux doigts, on dirait bien que tu vas devoir écrire, trouduc. », il le fusilla du regard en commençant à lire rapidement les documents. Il s'agissait de données sur l'érosion des falaises des côtes d'Amériques du Nord. Ça n'avait pas l'air ultra compliqué, mais il y avait beaucoup de documents, et puis travailler avec Sun, c'était si...
...si chiant, quoi.
« Non mais sérieux, mec ? S'allier ? Putain mais on fait ça comment ? Ah oui. Tu obéis et tu fermes ta grande gueule car j'suis mieux classé que toi. Bref, tu prends la moitié des docs et tu m'les debriefes. »
Sun n’aime pas collaborer et tout le monde le sait. Comment un adolescent qui provoque ses semblables peut être autrement ? Se mettre aux mêmes rythmes que les autres, devoir faire attention à ses productions, car elles ont un impact sur les autres n’aident pas vraiment à le canaliser.
Alors imaginez quand on le force à faire équipe avec son nouveau meilleur ennemi.
Tu ignores les grognements de Thorn qui ne semble pas prendre ta grande gentillesse à sa juste valeur. Tant pis, t’as essayé, tu ne peux rien faire de plus (ou plutôt tu n’as pas envie d’en faire.). Tu restes cependant sur le qui-vive, tu n’as pas envie que ton autre oreille subisse son courroux. (Mal)heureusement, le surveillant sauve ton intégrité pour une nouvelle forme de torture. Un devoir, sérieux ? Tu n’as pas signé pour ça.
Ou peut-être un peu pour avoir écorché le rouquin.
De la géographie. Tu ne détestes pas cette matière, à vrai dire, tu l’apprécies encore plus quand cela n’a aucun lien avec l’Europe, car cela te serait probablement inutile pour ton avenir. C’est ce que tu aimes dans la connaissance. Tu te sais d’un document et déjà, Thorn te tape sur le système. Déjà à se plaindre pour ses doigts. Il était en sucre ou quoi ? Tu grognes, mais tu ne l’insultes pas encore, peut-être parce que tu sens le regard du surveillant et tu ne veux pas cumuler plus d’heures que de raison. T’as quand même envie de profiter de ta vie d’adolescent, même si elle mènerait à une existence de désillusion et de vacuité.
Tu aurais laissé passer cette remarque contre de grosses fautes qui ferait, mais il était si difficile d’être sympa. Il t’ordonne ce que tu dois faire et il croit qu’il peut comme ça te canaliser. Il n’a vraiment pas compris comment te parler c’en est effarant que tu as presque envie de rire. Tu n’as rien à faire du classement, et avec un petit calcul, tu sais ce que tu vas faire.
Il est plus simple pour toi de remonter un zéro que descendre une bonne note.
Alors tu souris Sun, de ce sourire qui glace le sang, celui où autrui sait que tu feras chier le monde. Thorn. Tu chuchotes pour que tes mots ne restent qu’en vous :
« J’crois que t’es un peu con en fait. Tu réalises que vu que t’es en tête de classement, c’est toi qui risque de plus perdre que moi ? C’est pas un merdeux qui va me dire quoi faire. Remarque t’aime bien vivre dans la merde donc ça doit pas te changer… Puis avec du sang sur la copie, tu aurais peut-être des points de pitié. »
Tu n’écriras pas un mot pour lui, ou du moins aucun qui ne soit pas illisible pour le commun des mortels. T’allais vraiment bien t’amuser. Tu récupères ton visage désabusé, tu l'as suffisamment provoqué.Tu tournes la page et tu t’exclames bien trop fort :
« J’y connais rien sur… L’é-ro-sion ? La vache c’est compliqué l’Anglais… Y’a pas d’inflation aux US pourtant… C’est quoi une vague côtière ? Pourquoi on doit préciser ? Ce n’est pas pareil que pour les fleuves ? C’est où le Mississippi d’ailleurs ? Au Mexique ?»
Tu souffles et tu continues ta lecture, sur l’incompréhension de surveillant qui ne comprend pas vraiment ce que tu racontes. Tu saisis bien le sujet, mais tu annonces la couleur, tu seras un boulet jusqu’au bout. Tu liras tout juste pour lui faire perdre du temps. Puis la documentation est vraiment intéressante qu'il serait dommage de ne pas tout approfondir.
C'était une évidence, quelque chose qu'il aurait dû deviner du premier coup, et tandis que son visage se déformait en une expression pire que celles qu'il arborait lors de ses visites chez le médecin de l'orphelinat.
Il détestait Sun.
Non, il ne le détestait pas, il le haïssait. Qu'il lui dise en face de lui qu'il ferait tout pour le faire descendre dans le classement, le traîner dans la boue, et il savait qu'il le ferait avec toute la motivation dont il serait capable.
C'était un petit enfoiré, un avorton qui prétendait être idiot alors qu'il ne l'était pas du tout, qu'il était évident qu'il avait juste décidé de l'emmerder.
Et le pire, c'était qu'il prétendait ne pas connaître le mot « érosion » ; il faillit éclater de rire, sans avoir l'air joyeux, pour le coup. Ce type se foutait vraiment de sa gueule, non ? Qu'il remette en cause son intelligence, il pouvait encore accepter – et de toute façon, il n'avait PAS le choix de collaborer, ils étaient purement et simplement coincés ensemble, mais qu'il ne veuille pas agir, alors que la note comptait dans leurs moyennes ?
Dans SA moyenne.
Le teint de Thorn, plutôt pâle à l'origine, commençait à devenir de la même couleur que ses cheveux quand un élément extérieur cassa le rythme de la scène.
« Tu te fous de ma gueule hein, je le sais très bi- », commença-t-il à articuler avec difficulté avant qu'un événement inattendu ne l'interrompisse.
Le téléphone du surveillant sonna. Celui-ci s'empressa de décrocher, le colla à son oreille avant de courir à l'extérieur de la pièce.
C'était comme une occasion rêvée, le lancement d'une bombe à retardement, une opportunité qui pouvait ne pas être gâchée. Être seul avec Sun, ce pouvait être à la fois très dangereux et très fascinant, d'une part parce que depuis quelques semaines, il avait furieusement besoin de se défouler, d'autre part parce que Sun le mettait hors de lui.
Alors qu'il avait suivi du regard le surveillant qui s'était rapidement éloigné de la salle (vu la bombe qu'il y avait laissé, probable que quelque chose de bien plus chaud se déroule quelque part dans l'orphelinat), ses yeux avaient viré vers Sun, son poing s'était serré.
Thorn se serait bien déplacé pour fermer la porte, mais son action suivante aurait été complètement grillée. Il l'aurait cherché et il avait envie de le faire depuis longtemps. Il pensa à tout ce qui le rendait furieux en ce moment, entre Dorémi, la musique, les bouts de verre dans ses doigts, le fait qu'il l'ait traité de sauvage, tout cela avait que, pris d'un mouvement purement impulsif, il lui bondisse dessus et lui écrasa son poing dans la figure.
Cette fois-ci, il n'y avait pas de public pour les observer, les huer, pas de surveillant ou de prof à la con pour les séparer. Il avait bien senti le contact de sa joue, ou plutôt de son os, si bien que sa chair étant à vif, Thorn ne put retenir un cri de douleur.
« Mais connard ! », dit-il tandis qu'il se préparait à le frapper une deuxième fois.
Il n'était plus un génie à présent, juste un môme aveuglé par sa colère, facilement provoqué par Sun. Il laissa la rage prendre possession de son corps.
Tu l’as vu venir Sun, mais tu n’as rien fait pour l’empêcher. Le surveillant, le seul qui aurait pu éviter le drame sans est allé, et tu n’es pas assez con pour ignorer toute la colère que peut ressentir Thorn, colère que tu as attisée en jetant de l’huile sur le feu. Tu vois son poing se serrer, mais tu ne cilles pas, en vrai t’es presque content.
Tu te retiens même de sourire.
Ce n’est pas que tu aimes avoir mal, loin de là. T’apprécies moyennement le contact des phalanges, mais ça fait longtemps que t’a dépassé la colère brute, celle qui te fait frapper jusqu’au sang, celle qui te consume instantanément.
Toi,tu gardes les flammes dans ton estomac, tu attends juste le bon moment. Même si tu as mal, tu vois qu’il souffre aussi. Ca en vaut la peine d’attendre un peu.
Parce qu’il a tellement à perdre.
Un coup puis un deuxième, c’est tout ce que peut d’assener Tohrn, car déjà, le surveillant revient et sa voix tonne comme un coup de tonnerre :
« THORN ? Qu’est-ce que tu fais ? »
Tu te masses la joue, encore douloureuse, grognant : « Il a un pet aux casques, juste parce que je lui pose des questions. Faudrait l’enfermer... »
Tu jubiles tellement en ton for Sun, plus qu’un zéro, il risque bien plus gros. T’es heureux de foutre la merde dans sa vie. T’es heureux de le voir souffrir. Il n’a qu’à pas de commander, il n’a qu’à pas te rabaisser.
Tu aurais pu être sympa, mais pour l’instant t’as juste envie qu’il perde tout espoir.
[HJ : et hop, j'opte pour Pavloff pour le nom du surveillant, si tu as une idée pour sa tête, n'hésite pas :D]
Il aurait pourtant pensé pouvoir lui donner deux, trois, cent coups pour sentir ses poings salis de son sang et sa rage un brin calmée. Voir le visage meurtri et désolé de Sun, le priant d'arrêter, en train de lui dire qu'il était désolé et qu'il ne recommencerait plus jamais.
Le traiter de sauvage, se comporter si mal envers lui, précipiter sa chute qui ne saurait tarder.
Pourtant, Thorn avait fait une grossière erreur, quelque chose qu'il aurait facilement pu éviter quand on savait que l'orphelinat n'était pas si grand et qu'on avait laissé deux de ses plus « éminents » génies déjà connus pour se crêper le chignon en beauté dans une salle de classe.
Le surveillant revint, trop tôt et le rouquin entendit très distinctement la voix de Sun le traiter de taré. Il n'y eut de troisième ou de quatrième coup car Thorn se releva et n'insista pas (combien même, il savait que le surveillant était assez balèze pour les séparer tous les deux et Thorn ne souhaitait pas qu'on lui colle un rapport disciplinaire en plus).
« Mh. »
Sun avait gagné, c'était rageant. Il avait gagné, il ne foutrait probablement rien car il serait bien trop occupé à savourer sa victoire et ils se prendraient une mandale. Là, Thorn perdrait de précieux points (ceux pour lesquels il ramait alors que sa note de comportement était si basse). Sa défaite était totale et en plus, il se récupérerait sans doute des excuses officielles à faire et quelques heures de colle en plus.
-Thorn, qu'est-ce que tu fais, j'ai dit ? Réponds ? Tu te crois où ? Ça va recommencer comme au début ou ?
Le jeune garçon baissa les yeux, tenta volontairement d'éviter le regard de Sun. Il détestait quand ils faisaient ça, lui foutre la honte pour faire passer un message. Lui rappeler qu'à son arrivée ici, il avait mordu pas mal de monde avant de comprendre que la parole était meilleure conseillère pour faire passer des messages.
Le roux se mordit la lèvre, serra les poings. Il bredouilla de faibles excuses, plus pour qu'on lui fiche la paix que parce qu'il les pensait sincèrement.
« Désolé Sun. », il faillit ajouter un je l'ai pas fait exprès, mais la provocation aurait été totale, pas sûr que ça aurait été accepté, même Strong était plus sympa que ce trou du cul de Pavloff.
Le pire, c'était que maintenant, il y avait ce putain de devoir à faire, qu'il n'était pas du tout en condition et qu'il lui restait quelques heures à se taper avec Sun, ses traces de rouges sur sa peau si blanche lui rappelant sa putain de connerie. Il s'en rapprocha, venant choper son putain de cahier, son livre de merde.
Sun voulait jouer au con ? Et bien on allait voir qui était le plus con des deux.
« Lé-ro-sion, Sun. Pas l'inflation. Je sais que tu es vraiment débile mais tu devrais être capable de reconnaître ces deux mots. Ce serait con que je dise à tous tes potes que t'es même pas capable de savoir ça, hein ? »
La scène te fait jubiler Sun. Tu t’affiches un sourire presque solaire alors que tu fais tout pour ne pas se foutre de sa gueule. Ta rage se nourrit de son humiliation, tu as bien prévu que tu ne te prendrais pas trop de coups vu vos réputations respectives. Peut-être aussi que les accidents de l’oreille et du verre pillé t’as sauvé d’un ou deux coups de ton estimation.
Parce contre avouons-le, tu trouves presque moyen que le cher Pavloff – que t’apprécie que quand ce n'est pas toi qu’il punit- remue le couteau dans la plaie de ton pire ennemi du moment. Ton sourire a presque disparu. Toi, t’as le droit d’être un sale con avec Thorn, parce qu’il a commencé à te chercher des noises, mais qu’un adulte remettre sur le tapis sa condition déplorable à son arrivée. Tu ne connais rien de sa vie d’avant et tu t’en fous royalement. Tu juges les gens sur leurs actes, pas sur le merdier qu’il avait vécu avant le pensionnat. Tout le monde n’a pas la chance de vivre. T’as envie de grogner, mais tu te retiens.
Tu n’es pas encore au point de montrer de la compassion à cette enflure.
Par contre, tu graves ses excuses dans un coin de sa tête, même si elles ne sont pas sincères pour un sous. Tu pourrais lui rappeler que lui s’était excusé auprès de toi, et donc qu’il avait tout à fait tort depuis le début. Tu hoches la tête pour les recevoir, te retroussant les babines avec désinvolture. Le feu s’est un peu calmé, t’es maintenant plus en colère contre le surveillant que ton camarade.
Mais pas au point d’être conciliant, il ne faut pas déconner.
Après cette péripétie, tu te remets sur ton siège, tanguant dangereusement. Ta joue te fait un peu morfler, mais tu reprends le fil de tes pensées concernant les devoirs. Mais vraiment, Thorn devrait réfléchir avant de parler. Il pense pouvoir faire quoi avec des menaces aussi creuses. Ton sourire est glacial.
« C’est vrai que j’en ai quelque chose à faire de ce qu’en pense des autres sur mes connaissances. Attends, pas du tout ! »
Tu ne fais plus dans le faux-semblant, tu as compris que Thorn ne brille pas dans le profilling. Tu lèves les yeux au ciel et prends un document au hasard. Maintenant voûter et un peu plus proche du Martien, tu peux murmurer sans que le surveillant t’entende.
« Ecoute, vu que l’autre a vraiment abusé, je vais te donner un indice vu que t’es pas fute fute. Si tu me demandes gentiment, je t’aiderais peut-être, et t’as peut-être plus de chance de ma clémence si tu me supplies. Aussi j’en ai rien à foutre des autres et des classements, donc tente au moins un truc qui peut VRAIMENT m’atteindre. Là, tu me fais un peu pitié. »
Pavloff l'emmerdait. Pavloff le mettait hors de lui, c'était fou ce qu'il détestait ce connard et pourtant, dieu savait que les surveillants d'ici était relativement fréquentables.
À peu près, enfin quand on ne jouait pas avec leurs nerfs, comme Sun et Thorn le faisaient depuis maintenant quelques bonnes années. Grognant, le rouquin repiqua le nez sur sa copie, tentant de ne pas foutre un coup de poing de plus à Sun (cela ne servirait à rien en plus d'approuver la phrase que ce dernier avait dit à son sujet)
Thorn soupira, comprenant qu'il allait devoir faire un devoir en binôme seul et que son camarade ne ferait rien d'autre que le déstabiliser. La meilleure des réponses consistait sans doute à ne plus dire un seul mot (après tout, les dernières fois où il l'avait fait, Sun lui avait habilement démontré qu'il aurait mieux fait de se la fermer).
La tête dans les livres, il ingurgitait donc connaissances sur connaissances. Pas sûr que ça lui soit très utile dans la vraie vie, mais si ça pouvait lui permettre d'obtenir une bonne note, il s'en foutait un peu que d'accumuler des connaissances inutiles.
Le plus frustrant restait Sun. Sun et le fait qu'il avait l'air de refuser de coopérer (ça lui ferait sans doute du mal de voir son classement augmenter), Sun qui aurait pu installer une chaise longue et un parasol dans la salle de colle qu'il aurait été parfaitement à l'aise.
Thorn détestait ce type.
Il releva la tête vers lui et fut brièvement tenté d'écraser ses pouces dans ses yeux, pour le faire gueuler de douleur tellement fort qu'il en viendrait à regretter de l'avoir traité de la sorte. Fort heureusement, la seule (un brin dégueulasse il fallait l'admettre) resta dans sa tête et le rouquin se contenta en réalité de le regarder, un petit sourire malsain aux lèvres.
Il le prenait tellement pour une merde que ça lui donnait vraiment envie de se tirer en claquant la porte.
Si seulement. « S'il te plaît, Sun. », les mots sonnaient de manière si ironique dans sa bouche, lui-même avait du mal à les prononcer. C'était ridicule, l'implorer de quelque chose, comme s'il avait besoin de lui pour faire ce devoir. Thorn soupira puis pencha la tête, chuchota.
« Ce gros débile de Pavloff doit certainement noter nos comportements. Si j'ai joué au con, t'es pas mieux, il sera évidemment que j'ai bossé et qu'en a pas foutu une ramée. Ils savent sûrement que tu t'en branles du classement, en revanche, une deuxième heure de colle ou un truc pour te prendre du temps, ça, ils peuvent sûrement faire. »
Thorn croisa ses doigts, lassé de voir que le brun ne coopérait pas.
« Donc. Tu collabores, « s'il te plaît ? »
Il tendit une main devant lui, prête à accueillir celle de son camarade dans un geste de paix quasiment inespéré.
Tu n’espères rien de personne Sun, surtout pas de Thorn. Il est trop impulsif, si peu réfléchi, t’as un peu pitié de le lui maintenant que t’as gagné. Tu ne t’attends à rien, mais t’arrive presque à être déçu de sa réaction. Le rouquin n’a aucune subtilité dans ses intonations. Ca te gonfle presque que ce soit le même mec qui t’a blessé à l’oreille. Vraiment, en ennemi, t’as rêvé plus marrant.
Mais on ne choisit pas ses galériens en colle.
Tu es saoulé déjà, mais ton compère se rapproche, alors tu fais quand même l’effort de l’écouter. Tu lèves le sourcil, et dévisageant un instant Pavloff avant de soupirer. Tu as déjà perdu espoir sur l’évaluation de comportement, mais Thorn marque un point, t’en as un peu marre de te tourner les pouces dans une salle de classe avec des devoirs que tu rends presque jamais. Puis t’as bien envie de prouver à cette administration que quelques fois, t’es pas qu’un fauteur de troubles et que t’es un génie.
Comme tous les gens de cette foutue école.
Tu scrutes alternativement la main et le visage de Thorn. « Eh beh, c’est vraiment tout ce que tu as ? » Tu laisses un peu planer le suspens quelques secondes « T’as de la chance qu’il me sort plus par les trous de nez que toi, puis le sujet a l’air marrant. »
C’est donc en retroussant les babines que tu serres le pacte des meilleurs ennemis. Tu fais même attention à ne pas trop forcer à cause des blessures de verre.
Tu te redresses, maintenant tu es en mode sérieux. Tu te saisis donc derechef les différents documents et commence à les déchiffrer. Tu commences à les trier sans demander ton reste. « Impact ou origine ? » Vous avez perdu pas mal de temps, donc il vaut mieux être efficace. La géographie n’est pas ton domaine de prédilection, mais tu as confiance en tes capacités d’analyse et déduction. Rapidement, deux regroupements se forment avec pleins de petits tas selon les domaines. Une bonne organisation vous fera gagner un temps précieux.
Tu te penches sur ton sac sans quitter ta chaise et récupères des copies doubles, un stylo et un stabilo. Dieu sait que c’est la preuve dont tu ne rigoles plus. Tu notes rapidement le sujet et un coup d’œil vers le rouquin et demandant le plus sérieusement du monde : « Tu peux vraiment pas écrire ou bien ? »
Tu n’apprécies pas du tout faire le scribe, mais si tu n’as pas le choix, tu veux bien te sacrifier pour la cause. Si tu mets du tiens, tu peux vraiment être un bon collaborateur, même avec quelqu’un que tu n'aimes pas. Tu détestes par-dessus tout qu’on te force, c’est pour ça que tu prends les devants en faisant la demande. C’est moins de chance de t’énerver, donc que tu fasses tout capoter en plein milieu.
Mais tu sais très bien que ta tolérance est limitée.
Il ne fallait pas savourer la victoire trop tôt, c'était déjà assez fabuleux que Sun ait décidé de collaborer avec lui, et même si c'est parce que la tête de cet abruti de Pavloff lui revenait encore moins, ça resterait un exploit.
Paisiblement ou presque, Thorn s'étira.
Ses yeux quittèrent un moment Sun pour y revenir quelques secondes plus tard, l'observant se concentrer sur le sujet, se poser des questions sur celui-ci. Thorn aurait envie de ne pas réagir, le laisser se débrouiller tout seul, mais ça aurait été s'attirer de nouveau les foudres du brun, et celles de Pavloff.
« Mh. Je vais le faire. », répondit-il, s'emparant du stylo et commençant à prendre des notes.
Très curieusement, la colle se déroula bien par la suite. Lorsqu'il était concentré, Thorn était un garçon qui travaillait bien (la troisième ou quatrième place qu'il avait à l'époque n'était pas due au hasard). Malgré sa place loin dans le classement, Sun n'était pas mauvais non plus, il était évident que ce devoir ne pouvait être que bon.
Pas mauvais non plus.
Lorsque la fin sonna, Thorn finit de relire le devoir qu'il avait précédemment passé à Sun, corrigea deux ou trois coquilles rapidement avant de le rendre à Pavloff qui les sermonna évidemment sur le thème de « vous comprenez, arrêtez de vous en prendre les uns aux autres. Je vous attrape de nouveau, c'est colle jusqu'à la fin de l'année. »
Lorsqu'ils mirent enfin le pied en dehors de la salle de classe, ce fut comme si un vent de renouveau soufflait dans le couloir. L'adolescent prit une soudaine inspiration, puis souffla rapidement en songeant aux quelques activités qui l'attendaient : ne serait-ce qu'aller grimper aux arbres, aller tenter de parler à Castor, voir si ses pièges à lapin avaient fonctionné, par exemple.
Tourner la tête vers la droite lui révéla la présence de Sun (il ne l'avait guère oublié, ce n'était pas possible, mais il pensait que le garçon s'était dépêché de se tirer). Le roux dut faire la grimace à ce moment précis mais se heurta au regard sans équivoque de Pavloff qui fermait à ce moment la salle de classe et regagnait la cour.
- Arrêtez de vouloir vous fritter et allez jouer au foot quelque part avec les autres gosses !, avertit-il.
Avec Sun ? C'était bien comique. Il attendit que le pion s'éloigne de quelques pas pour laisser un léger rire sortir de sa gorge.
« Tu entends, Sun, tu veux aller t'exposer au soleil avec moi ? Si tu veux, nous pourrons même devenir les meilleurs amis du monde. », ajouta-t-il, avant de faire quelques pas vers une des fenêtres qu'il ouvrit.
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