Le calme faisait parfois un peu de bien. Cela n'arrivait pas souvent mais aujourd'hui, Zen avait préféré rester dans sa chambre pour faire ses devoirs. Généralement, elle se trouvait à la bibliothèque. Mais elle avait mal à la tête. Et son devoir la stressait tellement qu'elle n'avait pas besoin d'entendre ses camarades parler de tout et de rien. Un calme total était primordial.

La petite Mars était sociable. Elle s'entendait avec beaucoup de ses camarades. Elle aimait aider ceux qui en avaient besoin. Elle n'était pas la meilleure dans le classement mais elle s'en fichait pas mal. Il lui arrivait parfois d'avoir une petite attention pour quelqu'un. Faire plaisir ça lui donnait le sourire. Mais voilà, certains se jouent de sa gentillesse. Pas de chance pour eux, elle a aussi un sale caractère. Elle se serre alors de ses mains et sa bouche aurait droit à un bon bain de savon pour nettoyer toutes les horreurs qu'elle peut sortir dans ces moments-là.

De plus, elle fait partie des Mars. Cela signifie qu'elle est une adepte du sport en tous genres et les plus extrêmes sont ceux qu'elle préfère. Alors énerver Zen serait une très mauvaise idée. À vos risques et périls. Vous êtes prévenus.

Donc, la demoiselle essayait de batailler avec son devoir scientifique lorsqu'elle entendit des éclats de voix. C'était relativement violent et les sons se rapprochaient de plus en plus. Elle fronça les sourcils, ce demandant si elle devait sortir de sa chambre pour aller voir ce qui se passe (et perdre du temps pour finir son devoir) ou faire comme si de rien n'était. Mais avant qu'elle ait eu le temps de choisir, sa porte s'ouvrit à la volée.

— Lâchez-moi je ne veux pas je ne veux pas !

A force d’entendre la rouquine hurler, les surveillants de Prisme avaient fini par arrêter de lui répondre. Ils la laissent hurler à qui veut bien l’entendre, persuadés qu’elle finira bien par se calmer au bout d’un moment. Mais pour Emma, rien ne va. Rien du tout. Elle vient d’être arrachée à sa maison, à sa famille qu’elle a eu tant de mal à construire. On vient de l’envoyer dans un endroit qu’elle ne connait pas. Il l’appelle Prisme, un orphelinat pour surdoué. Mais l’enfant ne veut pas de ça. Elle veut Gilda qui lui a laissé son collier porte bonheur, mais aussi Don et tous ses autres frères et sœurs qui sont restés derrière elle.

Elle ne veut pas de Prisme.

Alors elle hurle.

Elle hurle quand on lui dit qu’elle ne pourrait par partir de Prisme avant sa 8ème année.

Elle hurle quand on lui dit qu’ici, elle sera soumise au classement contre d’autres élèves pour mesurer son intelligence.

Elle hurle quand on lui dit que désormais elle ne s’appelle plus Emma mais Ruby.

Elle continue de hurler, des larmes de rage perlant désormais contre ses joues rondes d’enfant malheureuse.

On continue de la trainer à travers un couloir. La soirée vient juste de débuter alors il n’y a plus grand monde dans les couloirs. Seulement quelques yeux curieux de voir qui est à l’origine des cris mêlés à des sanglots qu’ils entendent depuis maintenant plusieurs longues minutes. Emma se refuse à abandonner de se battre. Mais ses petits bras ne peuvent rien faire contre les deux adultes qui la maintiennent et qui la pousse à avancer vers un autre endroit qu’elle ne connait pas. Ses joues la brulent à force de pleurer et de crier. Chaque seconde passant, elle perd un peu plus de terrain, jusqu’à ce que finalement les deux surveillants s’arrêtent devant une porte puis l’ouvre sans ménagement.

La rouquine entend à peine ce qu’ils disent. Ils évoquent le fait qu’ils emmèneront vite ses affaires, qu’elle va être en colocation désormais et qu’elle allait devoir apprendre à vivre à Prisme. Puis la porte se referme. Emma se sent seule, terriblement seule. Tout doucement, ses cris s’arrêtent puis son corps glisse et se recroqueville contre cette porte close. La tête dans ses genoux, toujours sanglotante, elle n’arrive qu’à murmurer plus pour elle-même que pour cette jeune adolescente qu’elle n’a même pas regardé.

— Je veux rentrer chez moi….